jeudi, octobre 19, 2006

ROCK AROUND THE BUNKER



















Sursaut de cervelle, une phrase me revient soudainement à l'esprit : "tout semble opposer la culture des cultivés à la culture de masse : qualité à quantité, création à production, esthétique à marchandise, élégance à grossièreté, savoir à ignorance" c'est encore le vieux Morin dans une de ses prophéties rédigée début des années 60 "L'Esprit du Temps"
Ainsi la note de lecture d'aujourd'hui pourrait être attaquée sous l'angle de la quantité, toujours dans l'esprit du temps :

Les Bienveillantes, roman Numéro un des ventes en France depuis 2 mois. A la pesée : un bon kilo de papier, 900 pages, 500 000 mots, 2 500 000 caractères, 30 bonnes heures à s'y abîmer la rétine, 5 années de travail d'écriture selon l'auteur, déjà plus de 100 000 exemplaires vendus en France, stocks épuisés puis réapprovisionnés, thank god... et au final... ?

Au final, le roman épique, dostoïevskien (mais manquant selon moi du souffle lyrique qu'on trouve chez les russes ou chez Céline pour ne citer que lui) que nous avait vendu la presse. Le souci de l'auteur, montrer le nazi comme un homme abruti sous le feu de la propagande, prisonnier d'un système qui le dépasse, et traversé par des éclair de conscience et de doutes. Un peu comme chez nous dans la Matrice en somme, mais ne quittons pas notre route, le roman. Le roman pêche donc un peu trop souvent par des longueurs en partie du à ce besoin de descritpion quasi chirurgicale de la bureaucratie nazi, des nombreux services qui la compose et ne cessent de se tirer dans les pattes (SS, AOK, Einsatzgruppe, Kripo, GFP, SD, RSHA, ReichKomissariat...) et de l'abnégation et des peines qu'un officier moyen doit supporter pour faire son chemin et gravir tranquillement la hiérarchie nazillonne.

Et tout au long du livre, en filigrane, la question revient : qu'est ce qui a fait des SS des assassins méthodiques? Un cocktail variable d'exaltation idéologique, d'ardeur patriotique, de soumission à l'ordre, d'ambition, de cynisme, de désir de reconnaissance. Mais un authentique racisme, apparemment pas ou si peu, ou alors non, juste un racisme ordinaire, une mélodie en sous-sol mais rien de vraiment de plus revanchard ou sadique que dans n'importe quel autre conflit. Les juifs étant surtout envisagé comme un obstacle à la réalisation d'un grand projet national, il est donc légitime des les éliminer. Tel est la loi et l'homme est une créature qui aime tant à se soumettre à une loi. A certains moments on se demande autour de quelle vérité l'auteur essaie de nous convoquer, mais on continue de Stalingrad à Berlin, d'un hôtel thermal au bord de la Mer Noire à la Zone Libre française et la provence des années 40, on plonge. Mais quand même 30 heures de perdus dans ces pages alrs qu'on pourrait se la donner en terrasse de café avec notre dernière paire de basket Geox, à mater des culs...

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