mercredi, novembre 15, 2006
LE PAVILLON DES PAPIVORES
Tiens, semblerait qu'on nous ait collé des nouveaux surveillants médecins, on en a croisé deux hier dans les couloirs bleus néons de notre espace psychiatrique, deux grands corps maigres flottant dans leurs blouses blanches, et des gueules à taper dans l'armoire à pharmacie.
Une fois les lumières éteintes ça s'agite dans les chambres, ça tire des plans sur la comête, à quoi vont-ils nous cuisiner, les nouveaux? A grands coups de sismothérapie, bidouiller nos neurorécépteurs, ou par végétothérapie, vont-ils rouvrir les camisoles pour nous, estampillés "grands agités"... on nous assure que non. Nouvelles approches, thérapie par le verbe, traitement de choc à base de cut-up et métaphores, m'a glissé l'infirmier en chef. Mais qu'est ce que c'est que ce foutoir, c'est Babel, yo on est pas des rats de laboratoires chez Casablanca Asylum? Et puis on nous parle en quoi là? Novolangue?
Le plus abimés des deux nous demande de l'appeler El Ombre Invisible (rapport à sa période tangéroise où, fantôme sous palfium, il longeait les murs, invisible aux regards des locaux, high high high). Son jeune confrère, répond lui au nom de Self, Will Self. Les docteurs Burroughs (anesthésiste de son état) et Self (neuropsychiatre en chef) intégrent donc aujourd'hui la clinique avec la ferme intention de limer, voir cisailler nos cuirasses caractérielles. "La restauration de la puissance orgastique est la condition nécessaire pour faire disparaître les symptômes névrotiques ou les maladies psychosomatiques" me lance le vieux fou armé, citant Reich, Wilhelm.
Des magnétophones ont été placés sous nos lits d'hôpitaux, deux sous chaque lit, à 22 heures précises, heure de l'extinction des feux, les bobines s'actionnent et le noir s'emplit de deux récits s'entortillant comme des brins d'ADN : Le Festin Nu et Mon Idée du Plaisir. Le plomb de nos pathologies fondra-il sous l'incandescence des narrations? On en doute, vu qu'ici on a quand même la pathologie furieusement chévillé à l'échine.
Pendant la journée sur les bancs du grand parc et sous l'ombrage des ibiscus et autres faux poivriers, Burroughs bavarde, nous déroulant sa biographie au hasard des sursauts de sa mémoire émental. Lui en Guillaume Tell sous peyolt, une chambre vert olive sa femme snipée étendue morte sous la fenêtre, suit la fuite, d'abord à travers l'Amérique du Sud à la recherche du Yagé, racine à chamanes puis vers l'Afrique du Nord, le Tanger des années 50, chez nous ici, dans la Matrice, l'Interzone.
Et si ses productions, cadavres littéraires encore tièdes grouillent d'indics, si l'Interzone, ce territoire paranoïaque et sécuritaire, bourdonne d'inspecteurs et d'agents vasilineux c'est en partie du à l'expérience tangéroise, assimilation et réjection de la Matrice. Ce qui nous rappelle à notre engagement de vous radiographier sous peu la tranche sécuritaire du mille feuille que nous vous avions promis il y a deux trois posts... ça viendra, mais avant ça doit passer par le Bureau de la Censure.
Le Dr Self lui pour l'instant reste muré dans son bureau, on vous laisse juge : Dr Self Office!!!
et rien de transparait... son dernier opus sorti en Angleterre sous le titre "The Book of Dave" a-t-il déjà été traduit... dites moi que c'est Claro (Tof t'as toujours pas lu La Famille Royale de Vollman? traduite elle par l'excellent Claro) qui a fait le boulot!!! L'accès à la bibliothèque nous est encore interdit, quelqu'un pourrait nous filer des infos?
Interruption de la transmission.
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