lundi, novembre 19, 2007

L'APPEL DU LARGE


"J'ai longtemps habité sous de vastes portiques
Que les soleils marins teignaient de mille feux,
Et que leurs grands piliers, droits et majestueux,
Rendaient pareils, le soir, aux grottes basaltiques.

Les houles, en roulant les images des cieux,
Mêlaient d'une façon solennelle et mystique
Les tout-puissants accords de leur riche musique
Aux couleurs du couchant reflété par mes yeux.

C'est là que j'ai vécu dans les voluptés calmes,
Au milieu de l'azur, des vagues, des splendeurs
Et des esclaves nus, tout imprégnés d'odeurs,

Qui me rafraîchissaient le front avec des palmes,
Et dont l'unique soin était d'approfondir
Le secret douloureux qui me faisait languir."

Baudelaire, "La Vie Antérieure".


Toute cette mitraille de clichés sur le surf ne devrait pas pour autant nous empêcher d'en taire notre addiction.
Au début il y a l'océan. Lautréamont en parle mieux que nous. Quelques rames vers le large et rapidement il ne reste plus que lui, plan mouvant, grand royaume flegmatique. L'océan sous ta planche et le ciel sur tes épaules. Et toi, petit homme, insignifiante particule de vie progetée entre les deux éléments, tu te laisses paisiblement dissoudre dans cette étrange majestuosité. Tu disparais, happé par ces deux absolus.
Au loin il y a le bourdonnement de la vie, l'agitation des hommes, les calculs, la convoitise, les compromissions, toi tu n'en as cure, flottant sur l'infini silence marin, dans ce qu'un anglais surnommerait, sweet oblivion.

Et non, lecteur, le surfeur n'est pas non plus tenu d'être ce pantin péroxidé, billabongé, ripcurlisé de la tête aux pieds, grégarisé dans une communauté prônant dieu sait quelles valeurs sublimes.

Pour preuve, un des mythes fondateurs de la culture Casablancasylum : l'histoire solitaire de Jeff Clark, qu'on ne se lassera jamais de revoir.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Bel Appel mais pas émouvant quand meme ;)

Juste une interrogation : j'ai toujours entendu que le summum était d'accéder au tube et de surfer dedans enveloppé par la vague et je n'en vois pas sur la vidéo. Il est toujours au sortir de la vague et c'est quand meme pas mal.

Il y a quand meme mieux que la poésie : l'adrénaline !


Surfeurs du monde, je vous admire...

Antiphon a dit…

Dima! ton assiduité dans le dépot de commentaires sur ce blog ce devait d'être félicitée. Merci.
Pour ce qui est d'accéder au tube, la remarque vaut pour des vagues à taille humaines, celle de Maverick, sur laquelle surfe J.Clark est sensiblement égale à un immeuble de six étages, et dans ce cas, je pense que le but du vertébré qui la chevauche et de la descendre le plus vite possible pour éviter d'y broyer sa colone osseuse.

Anonyme a dit…

On apprend toujours. Merci.

Anonyme a dit…

Cher Antiphon,
je suis devenu accro à ton blog.
J'aime beaucoup le style de ton ecriture et la richesse de ton vocabulaire.bluffant!!
Continue.