
Chez Cazablancazylum on est à fond sur la satisfaction de notre lectorat. Ainsi, Imane nous demande des posts un peu plus développés, ce qui nous convient puisque on pensait justement à disserter aujourd'hui sur le philosophe au caniche : Arthur Schopenhauer, son concept du monde comme volonté, les réponses possibles à ce constat et enfin leur possible réalisation.
Donc selon Shoppy le monde est volonté, il est aussi incarnation de celle-ci dans des formes, de la matière, des volumes, des individualités, mais tout celà n'est que variation sur le même thème : vouloir, vouloir, encore et toujours vouloir. On n'y échappe pas, le vouloir et partout, aveugle tyrannique, obsessionnel, il soumet chacun et chacune, animaux plantes, éruptions volcaniques et les attractions entre les sexes. Vouloir : la chute d'eau, le vent et les montagnes. Vouloir : l'instinct sexuel et l'amour, les sensations, les perceptions, les émotions. Vouloir : les pluies babyloniennes, ou encore l'égoïsme des hommes, leur cruauté, leur souffrance, leurs douleurs. Et tout le fatras qu'on voudras encore y ajouter, profitez-en c'est illimité.
Le monde est donc un théâtre sur lequel se dévore les acteurs avant de succomber, emportés par la mort. C'est aussi, au milieu de ces singularités jetées sur scène de la folie et de l'imbécilité, de la naïveté et de l'infamie : tant de sottise, si peu de noblesse, autant de cruauté, et la grandeur faisant tellement défaut. A quoi ressemble alors l'univers dans ces conditions? Une planète froide et perdue dans une hystérie qui fait tournoyer les galaxies au dessus de nos têtes. Et des hhomoncules s'excitant en délire sur cette surface inhospitalière.
Arthur t'as le constat lacrimal, on fait quoi maintenant, sur ces bases?
Trois solutions selon celui qui déclara un jour "la femme est un animal à cheveux longs et à idées courtes", (essayez là en soirée, tabac garanti), on vous les faits courtes :
Première possibilité (la plus simple aussi) : la contemplation esthétique. Dans la relation qu'entretiennent le spectateur et l'objet apprécié, la volonté s'abolit, elle est mise à distance de manière désintéressée et l'acteur devient spectateur. Ecoutez Mingus, s'oublier dans un Rothko, lire un roman, voilà comment on se défait de la tyrannie de la volonté.
Deuxième solution : le passage au stade éthique. Le spectateur se contente de considérer la salle, il constate que tout le monde est embarqué sur le même titanic, soumis aux mêmes aléas, aux mêmes risques et qu'il n'y a de vérité que dans le traitement identique de tous. D'où la pratique d'une morale de la pitié, d'une éthique de la sympathie, amour du prochain compassion universelle et toute la gomme. Ainsi en se concentrant sur le travail universel de la volonté, il en oubliera autant les ravages qu'elle effectue sur le terrain individuel.
Enfin stade ultime et métaphysique, on s'affranchit totalement du vouloir. Le spectateur quitte la salle. Il éteint ses désirs, opte pour l'ascèse, le refus des plaisirs, renoncement au monde, dépouillement et nirvana pour pompom rose.
Le hic dans l'affaire Schopenhauer c'est qu'à la lecture de n'importe quelle biographie, on est forcé de reconnaitre que le philosophe est loin d'avoir réussi à appliquer lesdites solutions, les pieds dans le tapis Shoppy.
Mépriser l'argent? Lui qui calculait cent fois par jours ses thalers de rentier et d'héritier, lui qui cachait ses comptes... rédigés en signes cabalistiques!
Refuser les plaisirs du corps, lui qui lutine les domestiques, entretient des demi mondaines, s'amourache de prostituées, lui qui engrosse ici par là et laisse sa soeur réparer les dégats.
Bien alors peut-être que ne pouvant pas le plus difficile il se contente du plus facile, le stade éthique? Non plus, pas pour ce vieux parano qui lassé d'entendre sa voisinne sur le palier, un jour, la roue de coups et la précipite dans l'escalier.
Bien, il ne pratique pas la pitié avec ses voisins. Mais peut-être avec l'homme de la rue, en 1848 par exemple. Le peuple se révolte, il y a des barricades, des émeutiers, l'armée entre chez lui pour profiter de son appartement et des fenêtres idéales pour viser la foule. Et notre Arthur, tout enfièvré qui offre ses lunettes de théâtre pour leur permettre de mieux ajuster le tir.
Heureusement que l'oiseau s'est vite passionné pour l'écriture, la lecture et la flute. Ca lui laisse un fond de crédibilité.