vendredi, septembre 28, 2007

BAIN DE MER


On raconte qu'au moment où les Corinthiens s'apprêtaient à tenir un siège et en effectuaient les préparatifs, Diogène roulait sa barrique, ajoutant à la débacle, sans faire quoi que ce soit d'utile, mais singeant la précipitation et le sérieux des hommes affairés, se riant de leur myopie mentale. Incroyable, effroyable capacité de notre race humaine à se prendre au sérieux...


Le sérieux, une valeur universellement partagée


Les leçons de Diogène coulent comme du chocolat chaud dans les veines du grand Casablancasylum, organe parasitaire au service de la destruction des illusions humaines... ô trop humaines....

Ainsi donc et, fidèle à notre ligne éditoriale nous n'aborderons pas le thème du Ramadan 2007, long mois de solitude pour le français vivant au Maroc. Long mois pendant lequel l'étranger pourra à loisir apprécier sa radicale "étrangeté", sa condition de paria, d'ostracisé.

Nous ferons également l'impasse sur l'incontournable "Comment ramasser un max de thunes au Maroc" et n'aborderons pas non plus le problème des femmes mauritanniennes que l'on gave comme des canards à foie gras pour qu'elles soient grasses et en accord avec les canons de la beauté de cette province sablonneuse. Rien non plus sur la démocratisation, l'illetrisme ou les dernières élections au Maroc.

Au lieu de ça, une simple invitation. Respirez, détendez vous, et dirigez vous vers la plage la plus proche. Assis sur le sable, restez-y une bonne heure, les yeux dans les vagues, à réciter ces phrases intemporelles :

On a dit : "les yeux dans les vagues" !

"Vieil océan, ta grandeur matérielle ne peut se comparer qu’à la mesure qu’on se fait de ce qu’il a fallu de puissance active pour engendrer la totalité de ta masse. On ne peut pas t’embrasser d’un coup d’œil. Pour te contempler, il faut que la vue tourne son télescope, par un mouvement continu, vers les quatre points de l’horizon, de même qu’un mathématicien, afin de résoudre une équation algébrique, est obligé d’examiner séparément les divers cas possibles, avant de trancher la difficulté. L’homme mange des substances nourrissantes, et fait d’autres efforts, dignes d’un meilleur sort, pour paraître gras. Qu’elle se gonfle tant qu’elle voudra, cette adorable grenouille. Sois tranquille, elle ne t’égalera pas en grosseur ; je le suppose, du moins. Je te salue, vieil océan !"

Lautréamont : Les Chants de Maldoror - Chant I, Strophe IX.

jeudi, septembre 27, 2007

MOU DU BLOG


L'avantage d'avoir un blog qui compte trois lecteurs c'est qu'on peut à loisir, satisfaire nos penchants pour la médisance et la diffamation.
Ainsi alors que le blog de Laurent Bervas s'étoffe de nouvelles plumes et aligne en haut de page quatre ou cinq tronches de premier de la classe, le Casablancasylum lui, compte bien rester collé au radiateur, en fond de classe, à perturber cette petite société de jeunes loups aux dents longues.
Pour reprendre avec nos activités, et alors que sur le Casawaves, Marie-Aude, nous livre un billet passionnant sur... la harira...
Le Casablancasylum lui, offre aujourd'hui à ses lecteurs, un manuel vidéo sur l'utilisation d'une poupée gonflable.

dimanche, septembre 09, 2007

ROCOCO MOROCCO


Au Casablancasylum on aime les théories improbables, les affirmations fumeuses et ici ce soir encore nous marchons sur des oeufs, proposant sans complexe à notre fidèle lectorat planétaire un paralèlle entre la modernité à l'occidentale (dite "classique") et la modernité version marocaine (dite "rococo").
L'idéal classique est fondé sur deux valeurs universelles et fondamentales: l'ordre et la raison. Le Rococo quant à lui se démarque du classicisme par un enrichissement décoratif particulièrement chargé, exubérant, quintessencié.
Et ainsi en va-t-il également de la modernité. Déclinable en mode classique, baroque ou rococo.

On ne peut pas vraiment dire que le Maroc ait absorbé ou intégré le style de vie occidental. Il serait plus juste, plutôt que de parler d’absorption ou d’intégration, d’avancer tout de suite le mot : accentuation. Car on est ici confronté à une involontaire théâtralisation de l’occident contemporain. Et Casablanca dans sa modernité, nous apparaît parfois comme la version rococo du monde occidental. Le rococo entendu ici, nous le rappelons, comme style du débordement, de la surcharge aboutissant à un spectacle exalté et éblouissant. Le baroque et son goût pour l’ornemental et la mise en scène.
Le Mâarif est la perle rococo-chic du Maroc. Sur le trottoirs, de petites paysannes berbères à peine descendues de leurs montagnes paradent dans des vêtements de boite de nuit, comme sorti d'un clip de Snoop Dog, les yeux dissimulés derrières des lunettes imitations Christian Dior, on les prendrait presque pour des V.I.P. Le mâle lui, campe dans une version tout aussi rococo de la masculinité, tout en excès, tournant parfois dangereusement vers le burlesque à moustache.
Si le comportement était musique, la frime en serait le mode rococo. Et Casablanca la capitale nécessaire.
Postulat premier : le monde est un immense théâtre, un théâtre à ciel ouvert.
Postulat second : le théâtre est un monde d’apparences et de costumes trompeurs, un monde d’illusions
Conclusion : avec sa parfaite dramatisation et son souci de l’accentuation, la société casablancaise est le modèle le plus abouti du théâtre, même si son spectacle tourne parfois au cirque de foire.

LOLA RASTAQUOUERE OU ELOGE DE LA FEMME MAROCAINE


Le lecteur européen perché haut sur ses préjugés pourrait croire que, vivant au Maroc, on sort du champ des apparences et des phénomènes de mode comme ceux qu'on peut quotidiennement contempler sur la scène du grand théâtre du nord. Que néni, bistouri. Pas du tout, roudoudou. Si la modernité était musique l'Europe ressemblerait de plus en plus à une marche militaire et le Maroc à une symphonie de Monteverdi. Nous l'avons déjà vu précédemment, le Maroc est la version baroque de l'occident, la version technicolorisée, tridimentionnalisée, amphétaminisée du sociodrame européen, un opéra bouffe débraillé, bruyant, gargouilleux. C'est l'odyssée de l'excès, et dans les métropoles, comme ici à Casablanca, on peut à loisir observer l'homme surjouant son rôle de mâle dominant, et la femme de son côté surinterprétant de plus belle, campant sur son strapontin, french manucure, jeans-taille basse, brushing et balaillage, gemey, rouge, the devil wears Prada... c'est quoi ça d'ailleurs? un manuel de sciences sociales wahhabite?

portrait de l'homme résistant à l'émancipation féminine

Dans les 2500 ans de vie qui nous ont été accordé, à moi et mes sursinges collaborateurs ici à Casablancasylum, et qui d'ailleurs touchent à leur fin, dans ces 2500 ans de vie disions nous, nous avons eu l'occasion de dormir sous une multitude cieux et d'y fréquenter un nombre assez plantureux de femmes. Nous connaissions la femme française, ses glouglous de névrose, ses désirs de respectabilité et tout son fatras d’obsessions, l'américaine, à peu près tout aussi névrosée, avec ses fantasmes de barbie et sa vulgarité rose bonbon. Sans oublier l’anglaise, voluptueuse à tendance alcoolique, aussi imprédictible que la météorologie de son île. Mais comment imaginer ce qui nous attendait ici ? La femme marocaine. Et là, à la simple évocation de ses mots, notre main se fixe tétanisée par le déluge d’images et de parfums qui s’abat sur tout notre champ de conscience. La femme marocaine, la femme arabe ode à la vie, poème épique, allegretto roucoulant chantant la chair et l’amour. Comme on est loin du césarisme de la minceur version parisienne, et de ses exigences anguleuses. Oui, on a pas peur de le dire, la française a la fesse triste, la parisienne se dessèche, corps et âme. On pense même ici à monter une cellule de soutien au remplumage de la française. JOIN NOW! and get a free bonus t-shirt on www.feedthechicks.com
Et l'homme dans tout ça, le casablancais, qu'on connait bien ici... bah on lui dédiera une tribune entière et méritée, un de ces jours.

MAROC : MATRICE NORD-AFRICAINE


L'été touche à sa fin mais celà n'empêchera pas les macaques enfièvrés du Casablancasylum de vous balancer quelques rediffusions : une modeste selection des anciens articles fondateurs de la pensée du Casablancasylum.

Aujourd'hui le Concept de "La Chouma"

Prenez un européen, trempez le dans le Maroc. Il flotte! Génial. Laissez le barbotter un an deux ans quatre ans et ressortez-le de son bouillon, installez-le dans un canapé confortable, et interrogez-le. Qu'a-t-il appris, que sait-il vraiment du caractère, de l'âme marocaine? Une brousaille d'observations, de souvenirs, d'instants fuyants, mais rien de bien clair.
Perplexe, il vous regarde moitié rêveur, normal : il a vécu dans la Matrice.
La Matrice est pouvoir et contrôle, la matrice est orwelienne, invisible et affecte tout le corpus social. Parlons ce soir des relations humaines car j'ai là un exemple parfait et loin d'être marginal. Mon propriètaire, MRE toujours gai comme un pinçon, bavard et rieur est arrivé à Casablanca ce matin, et il est venu seul. C'est une première puisqu'il m'avait toujours habitué à le voir en binôme avec sa femme, berbère toujours gaie, bavarde comme une pie et rieuse. Un couple sympathique, pour ne pas dire parfois comique mais en définitve très attachant. Il a donc laissé sa femme chez eux dans le sud du Maroc en dessous d'Agadir, territoire berbère à 80% voir plus où, lorsque vous commencez un peu à discuter un peu avec un épicier ou un chauffeur de taxi vous vous entendez dire "ah oui nous, les arabes, on les aiment pas", ici commence le grand sud, le pays des saharaouia ces femmes marocaines descendantes des tribus tchadiennes, noires de peaux et circulant dans leurs voilages bariolés de couleurs pastelles, un délices de mauves et rose souris.
Mais revenons à Mr H. Nous sortons mangez sur la route de Tamaris et avant de descendre vers le jardin du restaurant je demande à au gardien de parking si on peut acheter des cigarettes et voici mon happy-proprio qui me lance "mais j'en ai moi! j'ai un paquet!" En deux heures de repas il en fume 6 ou 7 et j'ai beau remuer mes méninges je ne me rappelle pas l'avoir déjà vu allumer une cigarette. La raison, tout simple : Mr H. ne fume pas devant sa femme. Après 35 ans de mariage trois enfants deux maisons et tout ce vécu partagé, Mr H. cache à sa femme une manie qui semblerait, aux yeux d'un européen, parfaitement anodine et en regardant le sexagénaire griller ses blondes je me revois ado, planqué derrière le batiment d'EMT du lycée, goutânt aux premières joies de la fumée et de l'interdit.
Le concept de "chouma " (traduisez "la honte") est une forme de bienséance, de code de bonne conduite qui modèle, contraint et oriente le comportement des marocains, et l'un de ces codes qui d'ailleurs naissent d'on ne sait où (les cigarettes existaient-elles au temps de Moise, de Jésus ou de Mahommet?) prescrit de fumer devant ses proches. J'avais déjà constaté la chose chez pas mal d'amis marocains (trentenaires liberés) qui lorsque je les voyais avec leurs parents me prenaient à part pour me chuchotter "ne me prosose pas de cigarettes devant mes parents, ils savent pas que je fume!" et je ne m'en étais pas étonné, comprenant naturellement le respect des ainés et tout le toutim mais Mr H...
Manque de transparence, codification ultra-rigide des comportements? Les occidentaux vivent dans des societés post-religieuse mais si l'on en revenait à un radicalisme comme celui dans lequel vécu Copernic par exemple, et que le clergé se refaisait monstre tyrannique, nous serions nous aussi soumis à cette abondance de codifications existentielles, alimentaires, comportementales, rituelles et autres. Mais de Tanger à Tan-Tan, les codes s'exercent encore, et chacun doit savoir qu'il lui faut toujours obéir, se conformer, faire comme il faut, comme la religion nous y invite.
Ces codes, ces prescriptions et ces interdits, ces lois, cette logique du licite-illicite, forme une matrice dans laquelle l'homme évolue, la matrice est partout elle enveloppe tout le pays jusqu'en Iran, et la matrice fausse la vision de l'européen par sa complexité et des dédales de couloirs trop étroits. Elle génère toute sorte de mirage. Elle est mirage.
La nuit est déjà bien avancée, le royaume à réduit sa fureur et les lumières s'éteignent, la matrice, elle, est en mode ronronnant. Fin de communication.